Service de lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale

Faits

Un immeuble laissé à l’abandon est occupé par 16 familles comprenant 62 personnes, dont trente-neuf enfants en bas âge. Malgré que le propriétaire du bien ait obtenu devant la justice l’autorisation de faire expulser les squatteurs, l’autorité compétente a toujours refusé de prêter le concours de la force publique en vue de faire exécuter le jugement d’expulsion.

 

La société Cofinfo, propriétaire de l’immeuble à l’époque des faits décide de saisir la Cour en arguant que son droit à l’exécution d’une décision de justice (art. 6 CEDH) a été violé.

 

Décision

La Cour déclare la requête irrecevable pour non-épuisement des voies de recours internes.

 

Motivation

Le droit à un tribunal serait illusoire si une décision judicaire définitive et obligatoire restait inopérante . Un sursis à l’exécution d’une décision de justice peut se justifier dans des circonstances exceptionnelles, pendant le temps strictement nécessaire à trouver une solution satisfaisante aux problèmes d’ordre public.

 

 

La société est indemnisée pour responsabilité de l’Etat du fait du refus de prêter son concours à l’exécution de la décision d’expulsion. Néanmoins, cette indemnisation ne constitue pas une exécution de façon stricte de la décision, de nature à permettre à la société de recupérer la jouissance de son bien.

 

Mais la Cour observe que le refus des autorités ne résulte pas d’une carence de leur part. Il apparaît au contraire qu’un tel refus répond au souci de pallier les risques sérieux de trouble à l’ordre public liés à l’expulsion de plusieurs familles, parmi lesquelles se trouvent majoritairement des enfants. Et cette occupation s’inscrit dans le cadre d’une action militante à visée médiatique. De surcroît, les occupants se trouvent en situation de précarité et fragilité, et apparaissent mériter une protection renforcée.

 

La Cour note également que les refus successifs sont soumis à un contrôle juridictionnel, en l’occurrence celui du juge administratif, qui rejette à trois reprises les recours. Que les autorités ne restent pas inertes pour trouver un solution au problème posé. Et qu’une certaine marge d’appréciation est reconnue aux autorités nationales dans l’application des lois relevant de la politique sociale et économique, plus particulièrement dans le domaine du logement ou de l’accompagnement social de locataires en difficulté.

 

 

La Cour estime enfin devoir tenir compte de l’atteinte portée aux intérêts de la société. Elle note à cet égard qu’il n’y a aucun projet de viabilisation des lieux dans le délai de deux ans antérieur à leur occupation. Elle constate aussi que le recours contre le premier refus de soutien par les forces de police a été introduit tardivement, et qu’après le dernier refus, la société n’a plus activement essayé de faire exécuter l’expulsion.

 

Dans ces conditions, si elle retient que la société a indéniablement subi un atteinte à ses intérêts, la Cour n’estime pas devoir qualifier celle-ci de disproportionnée au regard des considération sérieuses d’ordre public et social.

 

Signification dans un contexte plus général

 

Texte intégral de la décision

 

Références

 

Mots-clés

Expulsion ; Art. 6 CEDH (droit à un procès équitable) ; Occupation d’immeubles vides